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Reconnaissance d'un accident de trajet emportant la condamnation de la CPAM

FAITS ET PROCÉDURE

Le 28 novembre 2016, la société X a déclaré à la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) des Vosges un accident de trajet survenu le 24 novembre 2016 à 10 heures au cours duquel sa salariée, Mme B, est décédée.

L’employeur a émis des réserves au motif que sa salariée ne devait prendre son poste de travail qu’à 12 heures.

Après enquête administrative clôturée le 2 février 2017, la CPAM des Vosges a notifié le 27 février 2017 aux ayants droit de Mme B un refus de prise en charge du décès au titre de la législation professionnelle.

Par lettre recommandée avec accusé de réception datée du 8 mars 2017, les ayants droit de Mme B ont contesté cette décision devant la commission de recours amiable de la caisse.

Le 2 octobre 2017, la commission de recours amiable a rejeté leur demande.

Le 4 décembre 2018, les ayants droit de Mme B ont formé un recours devant le tribunal des affaires de sécurité sociales (TASS) des Vosges.

Par jugement en date du 17 octobre 2018, le TASS des Vosges a :

- reçu les ayants-droit de Mme B en leur recours régulier en la forme, – constaté l’absence de conciliation des parties, – débouté M. A, Mme C, M. D en son nom personnel et en qualité de représentant de ses enfants mineurs, ayants-droit de Mme B, de leur recours, – confirmé la décision rendue le 2 octobre 2017 par la commission de recours amiable de la CPAM des Vosges, – débouté les parties de leurs autres demandes, – ordonné l’exécution provisoire, nonobstant appel, – rappelé que la procédure est gratuite et sans frais.

Le 5 novembre 2018, M. B, Mme C, M. D en son nom personnel et en qualité de représentant de ses enfants relevé appel de ce jugement.

Selon des conclusions adressées par le RPVA le 1er février 2019, ils demandent à la cour
de :

- dire et juger le présent appel recevable et bien fondé, – infirmer le jugement du TASS en date du 17 octobre 2018, – dire et juger que l’accident mortel du 24 novembre 2016 ayant coûté la vie à Mme B sera pris en charge au titre des risques professionnels, – condamner la CPAM des Vosges aux entiers dépens de l’instance ainsi qu’à leur verser la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel et la somme de 1 500 euros pour la procédure de première instance.

Selon des conclusions adressées au greffe le 13 mai 2019, la CPAM des Vosges demande à la cour de :

- recevoir ses écritures et les déclarer bien fondées, – confirmer le jugement rendu le 17 octobre 2018 par le TASS des Vosges, – condamner les ayants-droit de Mme B aux dépens.

A l’audience, les parties ont maintenu leurs demandes et s’en sont rapportées à leurs écritures.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément, pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, aux conclusions susvisées.

MOTIFS

En application des dispositions de l’article L. 411-2 du code de la sécurité sociale, sont assimilés à des accidents du travail les accidents survenus sur le trajet habituel entre le domicile et le lieu de travail.

Il est constant en l’espèce que Mme B a été victime d’un accident mortel sur l’axe routier constituant la voie la plus directe pour se rendre depuis son domicile jusqu’à son lieu de travail à Contrexéville.

La CPAM des Vosges s’oppose à la prise en charge du décès consécutif à l’accident au titre de la législation professionnelle au motif que celui-ci est survenu à une heure incompatible avec la distance à parcourir, compte tenu du moyen de locomotion utilisé et de l’horaire de travail.

Elle fait valoir à l’appui que l’accident, survenu à 3 kilomètres du domicile de la victime aux alentours de 10 heures du matin, pour un trajet d’environ 30 kilomètres et une prise de poste à 12 heures, n’a pas eu lieu dans un temps normal et que l’avance excessive prise par la victime

a été dictée par un intérêt personnel.

Les ayants-droit de Mme B contestent l’heure de prise de poste et soutiennent que le départ en avance ne relevait pas d’un intérêt personnel mais était justifié par le désir raisonnable d’arriver à l’heure compte tenu des circonstances.

Il résulte des procès-verbaux de l’enquête de la gendarmerie nationale pour accident mortel de la circulation routière, versés aux débats par les ayants-droit de Mme B, que la chaussée était humide et le brouillard épais lors de l’arrivée des enquêteurs sur les lieux de l’accident.

La CPAM des Vosges ne conteste pas l’affirmation des ayants-droit de Mme B selon lesquels le trajet habituel entre le domicile et le lieu de travail de la victime est constitué d’une route sinueuse, avec de nombreux virages dangereux.

Il ressort par ailleurs des éléments relatifs aux fonctions professionnelles de Mme B que celle-ci prenait son poste à 12 heures le jour de l’accident. Elle devait nécessairement arriver avant pour se mettre en tenue de travail et prendre les consignes.

Les ayants-droit de Mme B établissent ainsi que les conditions météorologiques dégradées et les dangers de l’axe routier emprunté justifiaient une réduction de la vitesse et une prise de marge sur le temps de trajet pour les difficultés prévisibles, et que la victime devait arriver raisonnablement une quinzaine de minutes avant la prise de poste, de sorte que son départ deux heures et quelques minutes avant 12 heures correspond à un temps de trajet adapté aux circonstances pour arriver à l’heure et ne relève pas d’un intérêt personnel.

Il convient dans ces conditions de dire que l’accident de trajet mortel dont a été victime Mme B le 24 novembre 2016 doit être pris en charge par la CPAM des Vosges au titre des risques professionnels.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce sens.

L’équité commande de condamner la CPAM des Vosges à verser aux ayants-droit de Mme B une somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et une somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel.

Par application combinée des articles 11 et 16 du décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018 et 696 du code de procédure civile, la CPAM des Vosges succombant dans ses prétentions sera condamnée aux dépens d’appel selon les conditions précisées au dispositif du présent arrêt.

PAR CES MOTIFS,

La cour, chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe de la cour, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

- Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le TASS des Vosges le 17 octobre 2018,

Statuant à nouveau,

- Dit que l’accident de trajet mortel dont a été victime Mme B le 24 novembre 2016 doit être pris en charge par la CPAM des Vosges au titre des risques professionnels,

- Condamne la CPAM des Vosges à verser aux ayants-droit de Mme B une somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance,

Y ajoutant,

- Condamne la CPAM des Vosges à verser aux ayants-droit de Mme B une somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel,

- Condamne la CPAM des Vosges aux dépens d’appel dont les chefs sont nés postérieurement au 1er janvier 2019.

Ledit arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, et signé par Monsieur Pierre NOUBEL, Président de Chambre, et par Madame Patricia LAGOURGUE, Directrice.